Que savez-vous de la recherche faite par les psychiatres de l’enfant et de l’adolescent du CIUSSS NIM ?
La recherche du CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal vous ouvre ses portes.
Nous vous invitons à découvrir la recherche faite par les psychiatres de l’enfant et de l’adolescent du CIUSSS NIM à travers ce portrait de la chercheuse associée au centre de recherche du CIUSSS NIM et coordonnatrice de la recherche au département de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent du CIUSSS NIM,
Mme Pascale Abadie!
Portrait de Mme Pascale Abadie
Pourriez-vous vous présenter ?
Je pratique la psychiatrie clinique depuis près de 30 ans, et la pédopsychiatrie à plein temps depuis environ 15 ans. Ma pratique est en clinique externe à l’Hôpital Rivière-Des-Prairies depuis 12 ans. Simultanément à ma résidence en France, j’ai eu l’opportunité de m’engager dans une maitrise de recherche en psychopharmacologie et plus spécifiquement en imagerie fonctionnelle, complétée ensuite par un PhD; cette expérience professionnelle a ancré définitivement ma méthode de travail.
Le département de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent au CIUSSS NIM s’est structuré avec des coordonnateurs.trices impliqué.e.s dans les activités académiques pour les membres du département, c’est ainsi que je coordonne les activités de recherche; mais je poursuis par ailleurs mes propres projets.
Qu’est-ce que la pédopsychiatrie ?
La pédopsychiatrie, également dénommée : psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, est une branche de la psychiatrie relativement récente, puisque cette pratique a émergé plus spécifiquement entre les deux guerres mondiales tant en Europe qu’aux États Unis.
La pédopsychiatrie porte sur le diagnostic, le soin et la prévention des troubles mentaux des enfants de la naissance jusqu’au début de l’âge adulte. Du fait de l’impact de la biologie et de la génétique, des relations avec la famille et de l’école et enfin de la culture et des supports socio-économiques sur le développement, c’est une discipline qui prend sa place à la frontière entre la médecine, la psychologie du développement, des sciences de l’éducation et de la sociologie.
Quels sont les défis et les opportunités de la recherche en pédopsychiatrie ?
La recherche en pédopsychiatrie ouvre la porte à une meilleure connaissance des dysfonctionnements ou des régressions associés aux troubles mentaux précoces, et du poids de l’environnement proximal ou distal. De plus, on sait qu’environ 80% des troubles mentaux chez l’adulte débutent avant 18 ans; ainsi ce champ de la recherche s’adresse à la compréhension des facteurs biologiques, psychologiques et psychosociaux des trajectoires psychiatriques.
La recherche en pédopsychiatrie permet de plus d’explorer les interventions biologiques ou psychologiques pouvant infléchir ou modifier ces trajectoires et les dysfonctionnements associés. Elle permet l’innovation et l’amélioration continue des soins de santé mentale offerts aux jeunes et à leurs familles à tous les niveaux d’intervention : en prévention, en première et en deuxième ligne.
Les défis de la recherche en pédopsychiatrie concernent essentiellement :
- la vulnérabilité des patients, face à certaines explorations ou interventions à priori invasives (ex : recherche en imagerie, essais pharmacologiques),
- les exigences du recrutement d’une population hétérogène cliniquement, présentant des symptômes peu spécifiques, souvent d’origine multifactorielle,
- les critères diagnostiques manualisés associés aux tableaux cliniques s’avèrent de plus en plus peu sensibles, ce qui mène à des données collectées hétérogènes.
Pour la recherche pharmacologique, les effets placébo (effets bénéfiques thérapeutiques obtenus grâce à la médication ou le traitement sans avoir d’effet spécifique) sont plus élevés encore que dans la population adulte. Enfin, compte tenu du peu de pédopsychiatres partout dans le monde et des listes d’attente longues, il est ardu de mener de front la clinique et la recherche.
Des particularités observées pour ce qui est de la recherche en pédopsychiatrie sur le territoire du CIUSSS NIM ?
La recherche en pédopsychiatrie au CIUSSS NIM a la particularité d’être une recherche cliniquement appliquée, ancrée dans le développement et l’amélioration de la pratique et des soins. Il faut souligner l’implication dans les activités de recherche de la majorité des membres du département simultanément à leurs activités cliniques, d’enseignement et de gestion.
Les thématiques diversifiées des projets de recherche allant de la physiologie et la pharmacologie, à la neuropsychologie, aux comportements dysfonctionnels, et à la démarche diagnostique et psychologique distinguent cette activité au CIUSSS NIM.
Pouvez-vous nous présenter quelques projets de recherche en pédopsychiatrie qui se font actuellement au CIUSSS NIM ?
Déjà, il faut rappeler les travaux de notre collègue Dr Laurent Mottron, qui s’attachent aux aspects cognitifs et langagiers de l’autisme; plus récemment, des ponts cliniques sont en cours grâce à Dre Laura Masi concernant l’usage des écrans particulièrement importante dans cette population. Dre Eva Flore Bui Xuan a démarré en outre un projet sur la catatonie, syndrome caractérisé par des troubles moteurs, affectifs, comportementaux et neurovégétatifs.
Chez les très jeunes enfants, l’étude de dimensions psychologiques comme l’attachement et la mentalisation est un projet en cours, avec la perspective de mesurer la réaction au stress grâce au dosage du cortisol salivaire; c’est l’équipe du pavillon Albert Prevost avec le Dr Alain Lebel qui est impliqué dans ce travail. Concernant la psychopharmacologie, Dre Drigissa Ilies travaille actuellement sur les effets métaboliques des antipsychotiques, une classe de médicaments utilisés pour l’irritabilité excessive ou les symptômes psychotiques, chez les enfants et les adolescents, et Dre Marie-Line Ménard s’intéresse aux effets indésirables des psychotropes, l’ensemble des substances qui agissent sur l’activité cérébrale et utilisées en psychiatrie. Et bientôt, Dr Émett Rabot va s’impliquer dans la recherche sur le sommeil chez les enfants et adolescents avec un trouble psychiatrique.
Une banque de recherche en pédopsychiatrie serait une innovation idéale en support à tous ces projets.
Vous travaillez sur un projet intéressant sur le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) et les jeux vidéo. Pouvez-vous nous en parler ?
J’ai eu l’opportunité de superviser la maitrise biomédicale de Dre Masi qui a porté sur la dépendance aux jeux vidéo chez des jeunes patients âgés de 4 à 12 ans, en comparaison à des enfants d’un groupe contrôle. Ce travail a montré qu’il y avait plus de comportements de dépendance chez les patients avec un TDAH. Les tableaux de TDAH plus sévères montraient de plus des plus hauts scores d’addiction.
Ce travail s’est poursuivi avec une étude longitudinale dans la même population au cours de la pandémie COVID 19; cette étude a été menée par des résident.e.s en psychiatrie que j’ai également supervisés. Ce travail confirme l’augmentation de l’usage des jeux vidéo en début de pandémie, pour diminuer ensuite, sans revenir au niveau pré-pandémiques. L’étude du coping, le mécanisme psychologique associé à l’adaptation au stress, dans la population confirme également que les jeux vidéo ont comblé l’isolement et que cette activité a été à l’origine de grandes dépenses en monnaie virtuelle. Ces projets multicentriques ont été réalisés en collaboration avec le centre de recherche du CHU Sainte-Justine, le centre évaluateur et j’en étais la chercheuse principale pour le CIUSSS NIM.
L’étude de l’usage des écrans et des jeux vidéo est un bon exemple d’une recherche en pédopsychiatrie aux confins de la sociologie.
Pour toute demande liée aux communications de la recherche du CIUSSS NIM :